vendredi, juin 22, 2007

« La France, dans sa diversité, est un acquis irréversible »

Album. Avec la France des couleurs, Idir livre une réflexion musicale sur le pays. Un produit aussi surprenant qu’indispensable.
Le signe distinctif des grands créateurs, c’est peut-être de surgir et de ravir là où on ne les attend pas. Cela vaut aussi en musique. 1973 : le Kabyle Idir se fait connaître en chantant A Vava Inouva, une belle berceuse sur l’exil et la terre natale, qui va faire le tour du monde. Quelques albums et prises de position plus tard, Idir crée de nouveau la surprise en 1999 : il s’entoure de chanteurs d’horizons divers (Maxime Le Forestier, Manu Chao, etc.) qui enregistrent avec lui ses chansons ou des compositions nouvelles sur un très bel album, Identités. Entre tradition et modernité, l’opus présentait une réflexion musicale sur les mélanges, les rencontres, les évolutions qui constituent et façonnent les identités.
Quelle innovation pouvait donc trouver maintenant celui que les médias hexagonaux surnomment tour à tour « le sage », « le phénomène de la musique » voire « la figure du commandeur » ? Tout simplement, émouvoir en chantant que « la France des couleurs défendra les couleurs de la France », phrase qui a donné son titre au CD et qui revient en leitmotiv dans cet album-concept. « En musique, j’ai voulu dire merci à ce pays qui m’a adopté », explique Idir. Et de poursuivre : « À l’heure où l’on mêle immigration et identité nationale, où l’on propose de mettre des drapeaux pour affirmer que l’on est français, je fais passer l’idée que la France d’aujourd’hui, dans sa diversité, est un acquis irréversible. » Ce point de vue, sa musique le reflète. Diversité des rythmes d’abord : rap, slam, pop, chanson, reggae ou R’n’B sont les ingrédients de ce savoureux cocktail mélodique. Mélange des langues ensuite : français, kabyle ou langues africaines offrent des sonorités variées. Brassage des générations et éclectisme dans le choix des artistes, encore : de Tiken Jah Fakoly à Grand- Corps Malade en passant par Jean-Jacques Goldman, Nâdiya, Leslie, Disiz la Peste, ou Yannick Noah, ce sont plus d’une trentaine d’artistes qui viennent mêler leurs voix ou leurs instruments à ceux d’Idir. Étonnement enfin, dans la France des couleurs, avec la participation de Zinedine Zidane et de quelques autres joueurs de l’équipe de France de 1998. « La victoire de la Coupe du monde a été une parenthèse, mais elle a donné un élan irréversible à la France d’aujourd’hui. Ces joueurs continuent à donner l’exemple de cette France unique, et peut-être que la France des couleurs a été inspirée inconsciemment de ce que cette équipe a offert au pays », justifie le chanteur. Entre hommage à cette France de la diversité et dénonciation de certaines pratiques comme les expulsions (dans Mama : « Ma terre a expulsé mon père [...] mais qu’a fait l’homme du ministère »), ce petit joyau de dix-sept titres hautement symboliques constitue presque un manifeste politique. Sourire aux lèvres, Idir rétorque : « C’est la raison pour laquelle je n’ai pas voulu qu’il sorte pendant la campagne. » Mais il reconnaît que « l’artiste est un témoin de son temps. C’est la main qui peut caresser, le doigt qui peut accuser, la posture dans laquelle il peut déplorer voire condamner des choses ». Avec la France des couleurs, il fait passer un message riche et généreux. Il y a des sages que l’on devrait plus écouter... et plus entendre.
CD : La France des couleurs. Idir, Sony BMG.

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